Adossée au fleuve, surveillant du coin de l’œil son célèbre voisin, Félix Leclerc et son espace, la Monnaguette de St-Pierre de l’Île d’Orléans est peut-être l’un des secrets les mieux gardés de l’Île de Bacchus..

L'origine la plus probable de guinguette proviendrait sans doute du mot guinguet, désignant un petit vin blanc aigre et bon marché produit en Île-de-France. Je vous rassure tout de suite, ça n’a rien à voir avec le cassis produit chez les Monna !

Parce que oui la maison Monna et filles produit, depuis 1992, bon an mal an, 20 000 litres d’alcool de cassis.

Petit-fils, voire arrière-petit-fls de liquoriste à Ganges dans le département de l’Hérault, dans le sud de la France, Bernard Monna arrive au Québec avec ses parents à l’âge de 14 ans. Vers le début des années 1970, il s’installe sur l’Île d’Orléans où il prendra racine avec l’idée de cultiver et produire du cassis. Sauf qu’il cherchera un bout des plants de cassis… avant de s’apercevoir qu’au Québec, le cassis se prénomme gadelle noire ! Il deviendra ainsi le premier producteur de cassis au Québec. L’emplacement actuel, à l’entrée de l’île, à St-Pierre, bénéficie d’un microclimat idéal pour la culture du cassis : un sol humide et bien drainé, protégé des gelées printanières grâce à la proximité du fleuve.

Le retour des filles prodigues

Père de trois enfants, Bernard Monna avait toutefois en tête de livrer son savoir-faire à ses descendants. Ce seront finalement ses deux filles, Catherine et Anne, qui viendront le seconder. Comment s’est-il pris pour les faire revenir à l’Île au début des années 2000 ? Par le ventre ! Anne Monna-Lamarre explique que l’idée d’ouvrir une espèce de guinguette, La Monnaguette, les a retenues à St-Pierre. « C’est ma sœur Catherine qui a eu l’idée de ça. Par la suite, on a fait nos preuves. Notre père a vu qu’on était travaillantes. On a donc pris les rennes de la Monnaguette. »

Chez les Monna, on peut dire que le cassis et l’esprit entrepreneurial coulent dans les veines de la famille !

Du nom du commerce des ancêtres français des sœurs Monna, la Monnaguette, sympathique resto café-terrasse de 35 places assises, nous fait découvrir via un menu alléchant les productions de la maison (la crème de cassis, le vin Le Fruité, Le Madérisé et Le Capiteux) et les multiples façons d’apprêter le cassis.

De la grappe à l’assiette

À la Montaguette, le cassis qu’on sert à table est contrôlé de A à Z par les producteurs. « Nous, explique Anne, la sœur cadette, contrairement aux liquoristes français, on cultive notre fruit. Pas de pesticide, pas d’insecticide, le climat québécois ayant des avantages pour le cassis ! »

C’est sûr qu’on connaît déjà le célèbre Kir. Mais la crème de cassis de chez Monna, qui compétitionne d’ailleurs avantageusement avec les Dijonnais – « Ouais, on les bat à plat de couture », dit Anne, sourire dans la voix et yeux pétillants en rappelant certaines compétitions récentes à Londres ou encore en Allemagne et en Belgique – sert aussi à d’autres sauces. On la retrouve notamment dans la confiture d’oignons ou encore dans des truffes au chocolat.

La carte de la Monnaguette nous fait saliver avec un menu de près d’une douzaine de choix, de l’entrée au plat principal, allant des surprenantes olives aux fines herbes marinées au vin et sirop de cassis jusqu’au sandwich au poulet mariné avec une tapenade olive, cassis et canneberge en passant par l’assiette de la Monnaguette  {saucisson, mousse de foie de volaille au Capiteux et fromage québécois).

Les plats préférés d’Anne ? La poutine au confit de canard avec une sauce au vin de cassis ou encore le sandwich au porc effiloché au vin de cassis sur pain cabota, servi avec frites, salade et vinaigrette au cassis.

Quant aux desserts, proposés sur une ardoise, donc changeant fréquemment, ne m’en parlez pas ! On aura peine à faire le tour de l’île, tant on voudra tous les goûter en commençant par le beurre de pommes, le gâteau au fromage à la gelée de cassis ou encore les démoniaques browniens au chocolat et fromage avec confiture de cassis.

La nouvelle saison pour la Monnaguette s’annonce d’ailleurs pleine de promesses, des travaux devant améliorer les lieux. À partir de cet été, « la terrasse sera couverte, tournée vers les champs de cassis », assure Anne Monna. 

« Quarante-deux milles de choses tranquilles », disait Félix de son île. Assurément que la Monnaguette en fait partie.