Les restaurants étrangers occupent une place importante, mais jusqu’à quel point? En nous basant sur des études scientifiques (ainsi qu’une enquête maison), nous avons tenté de retracer les origines des restaurants étrangers au Québec et de faire une mise à jour sur une recherche menée dans les années 1990. Mais avant, comme dans toute étude, il faut s’entendre sur une définition de l’expression « restaurant étranger ».

 

Qu’est-ce qu’un restaurant étranger?

Définir le restaurant étranger, aussi appelé restaurant ethnique, peut être difficile. Après tout, un restaurant français ou italien doit-il être considéré comme un restaurant étranger, même si leur nourriture ne nous est pas si étrangère? Si nous nous fions à la définition donnée par Laurier Turgeon, professeur titulaire au Département des sciences historiques de l’Université Laval, elle est plutôt simple. En effet, dans son livre Patrimoines métissés. Contextes coloniaux et postcoloniaux, il définit « le restaurant étranger comme tout restaurant dont l'enseigne ou la publicité annonce clairement une cuisine nationale ou régionale étrangère. » D’après cette définition, un restaurant français ou italien peut être étranger s’il valorise avant tout une cuisine nationale.

 

Les origines des restaurants étrangers

D’après les historiens Marc Lafrance et Yvon Desloges, il existait, dans le Québec du 19e siècle, trois types de restaurants : celui de type anglais, celui de type américain et celui de type français. L’Hôtel de France, situé à Montréal, était un de ces restaurants français se distinguant par sa cuisine et sa carte des vins.

 

Rejoint par téléphone, l’auteur Jean-Pierre Lemasson confirme la présence de la restauration française au Québec, notamment durant les années 1930. À cette époque, la province mettait cette gastronomie en valeur afin d’attirer les touristes américains. Il faudra par contre attendre jusqu’à la fin des années 1960 pour voir la diversification des restaurants étrangers.

 

« L’Expo 67 a été l’occasion pour bien des Québécois de découvrir les manières de manger à travers le monde, explique M. Lemasson. Suite à l’Expo, il y a pas mal de restaurateurs, qui étaient même venus là temporairement, qui sont restés et ont ouvert des restaurants qu’on pourrait dire ethniques. »

 

Depuis, le nombre de restaurants étrangers n’a cessé d’augmenter. Lors d’une recherche menée par M. Turgeon dans l’agglomération urbaine de Québec, on a remarqué qu’il n’existait seulement que huit restaurants proposant une cuisine de type nationale en 1951. En 1971, ce chiffre montait à 80 restaurants. En 1995, on en retrouve 200, soit 18 % des restaurants, ce qui fait de Québec la ville possédant le plus haut taux de restaurants étrangers alors que Montréal a le taux le plus bas (12 %). Autre fait intéressant : ce sont les restaurants français qui sont les plus représentés dans la ville de Québec, formant plus du tiers (36 %) des restaurants étrangers.

 

Et aujourd’hui?

Afin d’avoir une idée de l’évolution des restaurants étrangers à Québec depuis l’étude de M. Turgeon, nous avons consulté trois sites Internet offrant un moteur de recherche des restaurants : RestoQuébec, Guides Resto Voir et tonresto. En excluant la cuisine canadienne et américaine, ces sites Internet ont respectivement un taux de restaurants étrangers de 41 %, 50 % et 48 % pour la région de Québec. Quant aux restaurants français, ils représentent respectivement 8 %, 19 % et 11 % des restaurants étrangers. Pour expliquer ces écarts, il faut tenir compte des critères présents dans les moteurs de recherche, mais aussi du nombre de restaurants par moteur de recherche. Il est par contre intéressant de noter la diversité de différentes cuisines, qu’elle soit libanaise, indienne, caraïbéenne, mexicaine ou irlandaise.

 

En conclusion, même si nous avons remarqué une croissance du nombre de restaurants étrangers, Chantale Dubé rappelle, dans son mémoire de maîtrise sur la restauration dans la région de Québec, que ce sont les établissements de restauration rapide qui ont connu la plus forte croissance durant la deuxième moitié du 20e siècle. En considérant cette croissance ainsi que celle des restaurants étrangers, cela fait beaucoup de choix pour les consommateurs. Pour en savoir plus, nous vous invitons à lire l’article « Y a-t-il trop de restaurants au Québec? », sorti en octobre 2015.