C'est évident qu'il y aura un avant et un après. Exactement comme nous l'avons vécu pour les attaques du 11 septembre au niveau touristique et de la sécurité dans les voyages. Cette fois, les répercussions toucheront aussi les restaurateurs. Ils devront maintenant faire face à une nouvelle réalité en plus de devoir tirer des leçons de la crise que nous vivons actuellement.

Lorsque tout ceci sera terminé, le plus tôt possible, on le souhaite, est-ce que le consommateur aura changé ses habitudes? De quelles manières? Et le restaurateur, lui, comment devra-t-il adapter son offre pour attirer une clientèle tenue en confinement pendant de longues semaines?

 

Consommateurs

D’abord, les consommateurs voudront-ils rester chez-eux lorsque le déconfinement sera officiel? Ils auront probablement peur de croiser et rencontrer des gens pendant un certain temps encore et ils auront toujours en tête les mesures de distanciation sociale. Ces mesures devraient par ailleurs devenir une norme dans notre « nouvelle » société.

Et comme la pandémie en a poussé plusieurs sur le chômage et dépendant du soutien gouvernemental, il est possible que le budget soit réduit au maximum. Les dépenses de loisirs et de restaurants sont bien souvent les premiers qui passent au tordeur.

Mais le contraire est aussi plausible. Les consommateurs auront attendu tellement longtemps avant de revoir la famille et les amis qu’ils sont probablement déjà affairés à organiser la plus grande fête, tout le monde ensemble, dans leur restaurant préféré.

 

Autosuffisance

Cette crise cache une autre possibilité, qui pourrait donner du fil à retordre aux restaurateurs. Et si les consommateurs devenaient réellement autosuffisants, comme le souhaite le Premier ministre François Legault dans une certaine mesure? Pendant tout ce temps passé en quarantaine, les gens ont d’abord développé suffisamment de trucs culinaires pour se passer des restaurants. À voir les tablettes vides des épiceries dans la rangée de la farine, il y a de quoi s’interroger en effet. Ils retrouvent le plaisir d’antan de faire leur propre pain et leurs recettes familiales.

Avec l’arrivée du beau temps, ils ont aussi commencé l’aménagement de leur jardin d’où ils pourront cueillir les légumes pour la belle saison. Ils songent déjà à un moyen de conservation, comme la fermentation, pour la période hivernale.

Ainsi, les consommateurs, lors de la levée des mesures sanitaires, pourraient simplement vouloir recevoir parents et amis à la maison et préparer quelque chose qu’ils ont eu bien du temps à mettre au point!

 

Restaurateurs

Alors, avec ces possibilités, que devront faire les restaurateurs? Comment doivent-ils modifier leur offre afin d’attirer les consommateurs dans leurs établissements?

D’abord, savons-nous quelle quantité de commerces pourra rouvrir ses portes et quelle proportion sera contrainte de fermer à jamais, n’ayant pas été capable de maintenant à flot sa situation financière?

Selon un récent sondage de Restaurants Canada, tout porte à croire qu'environ 20 % des restaurants du pays fermeront définitivement.

Ceux qui continueront de faire des affaires devront garder en tête les mesures de distanciation sociale martelées pendant de nombreuses semaines par le Dr Horacio Arruda. Ils devront se poser la question : est-ce que mon restaurant peut être rentable même si j’élimine quelques tables et que je laisse plus d’espace entre chaque invité?

Ils devront aussi conserver les mêmes mesures sanitaires extraordinaires qu'ils ont mis en place dès les débuts de la crise : hygiène des employés et des clients, du matériel en cuisine, des poignées de portes, des outils de paiement, etc.

 

Achat local

Les différents paliers de gouvernement l’ont souvent mentionné au cours des dernières semaines, il devient important de favoriser l’achat local et d’investir dans les producteurs locaux afin d’assurer une relance parfaite de l’économie.

Les restaurateurs ont donc une responsabilité essentielle dans cette relance : ils doivent sans attendre trouver ces fournisseurs locaux et dès maintenant offrir leurs produits au menu.

Pendant un certain temps, il est évident qu’il y aura une guerre de prix entre les restaurants d’une même ville afin de regagner le cœur des consommateurs et les attirer dans leur salle à manger comme avant. C’est pourquoi la recherche de nouveaux producteurs locaux devient importante et qu’ils devront être choisis de façon intelligente.

Cette responsabilité de mettre de l’avant des produits locaux aura un effet doublement bénéfique :

1- Attirer une clientèle en salle à manger et donner de l’emploi à plus de cuisiniers et de serveuses

2- Faire connaître des producteurs d’ici qui pourront à leur tour augmenter la production et engager plus de main d’œuvre.

 

Technologie

Une autre leçon que les restaurants devront tirer de cette crise, c’est leur évolution et leur adaptation au côté technologique de leur gestion et de leur offre.

Dans tous les domaines, au Québec, les commandes en ligne ont connu une forte croissance pendant la crise. Cependant, ce n’est pas tous les commerçants qui étaient prêts ou qui avaient déjà un site transactionnel, prêt à en faire profiter.

Qu’en est-il des restaurants? Bien peu offre les commandes en ligne avec un système automatisé. Quelques-uns se sont débrouillés en acceptant les commandes par courriel, mais la gestion de la préparation et du paiement devait se faire manuellement.

Dès que leurs liquidités le permettront, ils devront s’ajuster à cette nouvelle réalité et améliorer les prises de commandes à distance. Ainsi, ils seront prêts à faire face à toute nouvelle crise éventuelle ou pourront simplement développer un nouveau créneau qui leur apportera de nouveaux revenus.

D’ailleurs, le processus de livraison et de cueillette, la seule façon de demeurer ouvert pendant la crise, devrait conserver le principe du « sans contact ». Il s’agit d’une autre des mesures sanitaires que les consommateurs commencent à apprécier.

 

Paiement

Finalement, un dernier secteur qui a été chamboulé pendant la crise, c’est la façon de payer les commandes. L’argent en espèces ne vient certes pas de connaître son heure de gloire. Au contraire, la carte de crédit a pris toute la place et la survie de l’argent sonnant est remise en question.

À ce niveau également, les consommateurs ne voudront plus manipuler des outils que d’autres ont aussi touché il y a quelques minutes à peine. C’est pourquoi ils vont de plus en plus privilégier toutes formes de paiement sans contact. Votre restaurant est-il prêt à prendre ce virage?

 

Réalité et leçons

En résumé, une nouvelle réalité se dessine : les consommateurs vont garder les principes de base de la distanciation sociale, auront redécouvert le plaisir de cuisiner et de s’occuper d’un jardin et les restaurateurs devront trouver une nouvelle façon de les attirer.

Et des leçons, les restaurants peuvent en tirer quelques-unes maintenant : conserver les mesures d’hygiènes extraordinaires, s’approvisionner chez les producteurs locaux, développer un processus automatisé de commandes en ligne et miser sur les paiements sans contact.

 

« Il ne faut jamais gaspiller une bonne crise », disait Winston Churchill. Une crise sert à s’adapter pour survivre, sinon…