En moins de dix ans, ils sont passés de bar tender à mixologues. Une évolution, non seulement au plan des mots, mais aussi des saveurs. Un changement d’appellation au service du plaisir de la redécouverte de grands classiques.

Le mixologue est au barman ce que le chef est au cuisinier. Ce n’est pas moi qui le dis, mais Nader Chabaane, grand manitou en matière de mixologie au Château Frontenac. Sa passion s’exprime à la fois au Sam et au 1608, deux bars complètement rénovés avec  vue imprenable sur le Saint-Laurent. Celui qui a appris son métier à Paris, qui s’est installé au Québec, il y a moins d’un an et qui, il y a à peine six mois, remportait le prix des médias lors de la 5e édition du concours Made with love réunissant les meilleurs mixologues du Québec, s’est fixé comme objectif d’instruire, de faire connaître aux Québécois la base d’un bon cocktail. « J’essaie de réapprendre aux gens ce qu’ils aiment, mais qu’ils disent qu’ils n’aiment pas ! » Ça doit fonctionner car le Sam est en train de se tailler une place enviable dans les bars nouvelle vague dans la capitale nationale. Nader Chabaane et sa bande derrière les bars réussissent à faire de ces coins du Château des endroits décontractés où on s’amuse ferme. Qui l’eut cru !

Nader Chabaane a d’ailleurs eu comme idée de transporter le bar aux tables. C’est ainsi qu’il sert son negroni dans trois petites bouteilles – campari, gin et vermouth rouge - que le client mélangera lui-même.

Mais au-delà de l’aspect surprise de voir ainsi son drink présenté, la base même d’un bon cocktail s’articule autour de trois ingrédients : alcool, sirop, bitter.

Bons produits = bons cocktails

Même si le XXIe siècle a donné naissance à quelques cocktails moléculaires – chers au demeurant -, il faut savoir qu’en matière de cocktails, les grands classiques nous viennent du début du XXe siècle principalement de Londres, Paris et New York. La prohibition américaine fut d’ailleurs source de créativité comme pour le Side Car ou le White Lady !

Certains mixologues tentent d’ailleurs de retrouver les goûts du passé. Pour se faire, on apportera un soin particulier aux sirops par exemple. Au point que certains bars comme le Lab à Montréal, rue Rachel, en commercialisent*. Citronnelle et concombre, orgeat, gingembre et cayenne ne sont que quelques-unes des saveurs développées par Gabrielle Panaccio, Propriétaire du Groupe Lab, Comptoir à Cocktails et mixologue. (Proxibar, Lab, Secrets du Comptoir) .

À ceux qui disent que faire un mix, exemple, avec un gin ordinaire et un gin de l'Ungava, c'est du pareil au même, que répondent les spécialistes ? « Les gens qui auront cette réponse ne connaissent probablement pas ces produits.  Je leur répondrais, assure Mme Panaccio, par une autre question. Si je fais une soupe de carottes, est-ce que cela sera la même chose que si j'utilise du panais ? Pourtant, c'est de la même famille...  Il n'y a pas de gin ordinaire, tout est une question de saveur, parfois subtile mais les différences sont là !  Et un conseil, ne parlez pas de marque mais plutôt de saveur ; j'aimerai un gin très herbacée et puissant comme Tanqueray (agrumes) ou Ungava (amertume, genièvre) ou plutôt doux comme le Botanist (camomille et autres saveurs) ou le Barhill (miel).  Bien sûr, il y a des alcools de meilleure qualité que d'autres, mais c'est avant tout une question de goût ! »

Et pour le commun des mortels, la mixologie, ça s’apprend ? Absolument ! Un exemple concret. À Montréal,  les Agitateurs Gourmands offrent essentiellement des ateliers mixtes cuisine-mixologie. Les menus proposés en atelier visent à marier l’aspect organoleptique des mets cuisinés par les participants à des cocktails. On y donne aussi des ateliers de mixologie pure en partenariat avec Proxy Bar.

Bon, on se laisse avec un dernier pour la route ? Ou plutôt deux. Une gracieuseté de Gabrielle Panaccio. Pour débuter, l’une de ses compositions, le So Fresh et le second, un classique, le Mai Tai.

 

So Fresh!       

1 Branche de romarin

30 ml de sirop de Gingembre Infernal du Lab

30 ml de jus de citron

30 ml de vermouth sec

30 ml de gin

 

Mai Tai

30 ml de jus de lime frais pressé
15 ml de sirop pour cocktails Orgeade (orgeat) du Lab
15 ml de Cointreau
22 ml de rhum brun (Appleton V/X ou Brugal)
22 ml de rhum agricole (St-James ambré ou blanc)

 

*Les sirops du Lab sont disponibles via internet à alambika.ca ou dans certaines boutiques spécialisées telles à :

Sherbrooke :

Au vent du Nord

 

St-Hyacinthe

Les passions de Manon

 

Québec :

Épicerie Moisan

 

Montréal :

Le marché des saveurs du Québec au marché Jean-Talon