Depuis quelques années, nous assistons à ce que nous pourrions appeler une intensification de l’achat de produits alimentaires locaux. Si certains restaurateurs avaient dès le départ favorisé des liens avec les producteurs de la région, d’autres tentent de s’adapter aux goûts de la clientèle. Cependant, il existe certains inconvénients comme le rappelle Myriam Larouche, propriétaire de l’entreprise À l’Orée des champs :

 

« Il faut être prêt, comme restaurateur, à avoir des ruptures de stock parce que ce n’est pas la bonne saison, parce que le producteur n’a pas nécessairement toujours des produits qui sont égaux, qui sont uniformes. C’est d’être prêt à faire plein de compromis. Donc, il y a un intérêt, mais lorsque vient le temps de mettre ça en pratique, ce n’est pas toujours évident. »

 

Du côté du producteur, ce dernier doit être prêt à vendre son produit à un prix abordable pour le restaurateur. Afin d’avoir affaire à peu d’intermédiaires et d’aller chercher le maximum de retombées économiques sur la production, certains producteurs diversifient leurs activités. Dans le cas d’À l’Orée des champs, cette entreprise, qui a débuté en tant que ferme familiale en 1925, s’est incorporée en l’an 2000. Ce n’est depuis que 2008 qu’elle offre une table champêtre et met en valeur son agneau.

 

« Au départ, c’était très difficile de commencer avec un produit comme l’agneau, commente Mme Larouche. C’est un produit de niche. Ce n’est pas tout le monde qui aime d’emblée, donc il y avait énormément d’éducation à faire. Je dirais que les 3-4 premières années, on a beaucoup débattu notre point pour insister à mettre de l’agneau à notre menu et faire en sorte que notre clientèle apprécie ce produit-là. »

 

Depuis l’année passée, elle a constaté un changement au niveau de la demande et elle a même pu ajouter de l’agneau dans le menu du déjeuner. L’éducation auprès de la clientèle a ainsi porté fruit.

 

Pour d’autres producteurs, la création d’un casse-croûte ou d’un restaurant est l’étape logique d’une longue tradition. Depuis 18 ans, la Poissonnerie Lauzier de Kamouraska vend ses produits de la mer et dispose d’un bistro depuis 2010.

 

« Nous autres, on est une famille de pêcheurs, explique Bernard Lauzier, alors on est dans le domaine de la transformation de poisson parce que c’est notre métier à la base. »

 

Enfin, selon le produit, il peut être plus avantageux de favoriser la transformation plutôt que la restauration. Par exemple, le Verger Le Gros Pierre, qui existe depuis 1980 à Compton, a installé une presse à jus artisanale en 1986. Par la suite, au cours des années 1990, une cuisine a été conçue pour produire des tartes, de la confiture ainsi que des pâtisseries. Il faudra attendre en 2006 pour qu’une crêperie s’ajoute aux installations.

 

« On voulait que les gens viennent sur place et qu’ils peuvent faire un pique-nique, alors on a fait une crêperie casse-croûte pour que le gens connaissent les produits de la région, explique Gaétan Gilbert, copropriétaire. Le but c’est de mettre dans l’assiette tout ce qui a autour de nous. »

 

Pour certains producteurs, la restauration ne permet non seulement de mettre en valeur ses propres produits, mais aussi ceux des fermes avoisinantes. Cette collaboration établit ainsi de nouveaux liens d’entraide.

 

En conclusion, il reste beaucoup de travail afin de sensibiliser les consommateurs ou les restaurateurs aux produits alimentaires locaux. Selon M. Gilbert, ce sont les consommateurs qui sont en avance sur les restaurateurs. Récemment, l’Union des producteurs agricoles a annoncé sur sa page Facebook que 170 000 personnes ont visité l’une ou plusieurs des 107 fermes lors de sa douzième journée Portes ouvertes, prouvant du coup l’intérêt sans cesse renouvelé des consommateurs pour les producteurs locaux. Comme l’ont mentionné plusieurs fois certains intervenants dans ce dossier, nous sommes sur une bonne lancée.